ENEMY OF THE MUSIC BUSINESS


Mozaque / TERRORIZER / Septembre 2000

Intitulé "ENEMY OF THE SUN"

Il est approprié de voir que l'action la plus spectaculaire que Napalm Death ait accomplie est de revenir en arrière. Après s'être rapproché de ce qui ressemblait à un semblant de composition sur leurs récents albums, une progression bienvenue pour un groupe qui aurait facilement pu tomber dans l'auto-parodie, "Enemy of the music business" est un retour à leurs racines grindcore sulfureuses.
L'expansion n'a jamais vraiment été dans la nature de Napalm. Ils étaient toujours à leur paroxysme lorsqu'ils se rétractaient en une boule de son prodigieusement dense, quand leur monument ne trouvait aucun exutoire pour se défouler. Les jours radieux sont de retour.
Mais "Enemy" n'est pas cause de nostalgie. Il n'est pas définitif, il est régulier, s'inventant une catégorie à lui tout seul. C'est une révélation, et l'un des disques les plus époustouflants et tranchant-comme-une-lame que j'ai entendu cette année. En fait, amplifiez cette impression. Imaginez le Gillette 'Mac 500' dans les mains d'un épileptique particulièrement fervent et vous obtiendrez quelque chose de proche. La première fois que j'ai écouté "Enemy", je l'ai détesté. C'est bon à ce point.
Car "Enemy" est un disque avant-gardiste. N'importe qui peut faire du vacarme, mais - et je ne sais pas qui citer d'autre - peu de groupes peuvent faire un vacarme décrit avec autant de complexité, et toujours avec cette précision mortelle. Ici, tous les morceaux se bouffent constamment la queue, la dévorent, la régurgitent et à la fin, on se retrouve au point de départ. Sur "Enemy", vous aurez du mal à trouver quelque chose qui fasse penser à de la musique. Il n'y a rien de narratif, aucune sensation dramatique, certainement pas de reconnaissance de quoi que ce soit d'autre excepté lui-même, c'est juste un processus pur de réflexion sur soi-même, une équation brutale et continue se ré-assemblant et se réitérant à l'infinie.
On a l'impression d'être projeté contre l'une de ces structures fractales, qui révèlent un niveau de détails quasi infini ; les contrepoints et interactions atonales, comme si l'on ne pouvait dire si les instruments se font la guerre entre eux ou créent sans cesse de nouvelles alliances, les fréquences graves creusées par Barney, le rythme des percussions palpitantes qui change constamment et des guitares qui s'étalent comme le déversement de gaz empoisonnés puis se rétractent à nouveau dans des attaques de riffs purs redirigées tellement perpétuellement qu'elles enverraient n'importe quel cartographe en herbe dans un hôpital psychiatrique, en supposant qu'il puisse ensuite retrouver ses facultés. Ils ne vont nulle part. Dés la seconde où ils atteignent une certaine direction, ils reviennent là où ils ont commencé, jusqu'à ce que vous vous imaginiez des ogres particulièrement malchanceux qui joueraient au jeu de l'oie en ayant pris du speed
(web : mélange de coke et d'héro, je crois).
Le seul moment qui donne l'impression d'être accessible est sur "Next On The List", les guitares se soulevant et retombant à travers des simili accélérations, avant d'être prises en spirale dans une tempête sonique. "Taste The Poison", le morceau d'ouverture, se divise en un habile nausée-et-réponse de la part de Barney qui donne vraiment l'impression qu'un cascadeur s'écroulerait d'une montagne avant d'être fouetté à coups de chaîne par une basse crado et puante, et "Cure For The Common Complaint" se charge en puissance grâce à un riff qui fait penser à une anguille électrique se tortillant et qui aurait empli de fierté les Young Gods.
Si "Enemy", comme son titre le suggère, est un disque de protestation, c'est un de ceux qui arrivent à faire leur trou à la seule force de leur poignet. En cet instant, je n'en ai rien à foutre des courant qui montent ou qui disparaissent, de ce qui est 'marketable' ou pas, de tous les discours que vous pourrez racoler pour remettre Napalm Death à sa place. Ce disque vit d'après ses propres règles et c'est tout ce qui compte pour moi.

Classement : 9/10, c'est à dire "excellent". Il était d'ailleurs Album du mois !!


Quelques citations supplémentaires tirées de la presse anglaise :

"Le Napalm actuel est un monstre plus brutal que jamais"
Mike Exley, Rock Sound 5/5

"Leur album le plus effrayant depuis des années"
Dave Ling, Metal Hammer 9/10

"Leur album le plus broyant à ce jour"
Darren Sadler, Classic Rock 4/5


Olivier Badin / HARD'N'HEAVY / Novembre 2000

Napalm souillé, Napalm outragé, Napalm conspué. Mais Napalm libéré. Messieurs et mesdames, vous allez assister au come-back de l'année en terme de métal extrême. Et nous parlons de VRAI extrême. La machine semblait définitivement grippée depuis quelques années, en préretraite, minée par ses relations notoirement désastreuses avec le label Earache dont elle semblait pourtant indissociable (depuis le mythique "Scum", soit depuis 1987 !). Chaque nouvel album s'enfonçait dans une routine mortelle. Jusqu'au divorce avec Earache et surtout le EP "Leaders Not Followers". Un 'vrai-faux' aparté qui s'est révélé une pilule de Viagra puissance dix pour un Napalm Death qui revient aujourd'hui au sommet. Déjà, parvenir à son neuvième album (!) est quelque chose d'unique dans le métal extrême. Que, non seulement, "Enemy Of The Music Business" soit peut être son meilleur album mais aussi complètement en phase avec son époque est également un exploit. Revigoré par la production de Simon Efemey (qui avait travaillé avec Paradise Lost, sur le Meat Hook Seed et justement "Leaders Not Followers") qui leur donne un son à faire tomber le papier peint, ce disque monumental propose une synthèse complète de "La mort au napalm". De pure tueries grindcore comme on n'en avait pas vu depuis "Utopia Banished" ("Can't Play, Won't Pay" ou "Conservative Shitheads part 2") côtoient des morceaux plus accrocheurs à la Greed Killing (un "Necessary Evil" à se décrocher la tête du reste du corps) ou des Exocets (web : Exocets = nom donné à un missile français automatique) plus branchés death old-school comme à l'ère dorée de "Harmony Corruption". On a même droit à un break digne de Celtic Frost sur "Fracture In The Equation" ! Tout ça en proclamant plus que jamais une attitude frondeuse et à cheval sur des principes d'indépendance qu'il a lui-même érigé. Napalm Death joue selon ses propres règles et s'est réinventé. Sa foi et sa rage légendaires sont de retour. A genoux.

Classement : 5 étoiles sur 5 (la meilleure note jamais attribuée à ND !!! BRAVO Olivier)


Nicolas Radiguet / HARD ROCK MAG / Décembre 2000

Neuvième album pour un Napalm Death plus fou que jamais ! Cet album est des plus incroyables. On se demande d'ailleurs comment c'est possible, tant il inscrit le retour du groupe dans un cadre d'ultraviolence. Sans vouloir remettre en cause son évolution sur ses dernières productions, il faut reconnaître que Napalm Death avait privilégié un death certes toujours brutal, mais affiné. Sur "Enemy Of The Music Business", sa musique retrouve son caractère d'urgence, sa folie d'antan, sa violence éclatante et débridée. Et il ne s'agit pas d'une tentative de faire revivre le passé par quelques artifices, comme le font beaucoup de vieux groupes extrêmes qui en savent plus trop quoi faire pour s'en sortir. Napalm Death est en phase avec son époque, on pourrait comparer cette explosion d'énergie à un jeune premier qui en veut à la terre entière. Et imaginez ces débordements servis par une expérience qui, plus que de les canaliser, cherche à les rendre encore plus percutants ! Le groupe renoue avec les tueries grind-death, le death de "Utopia Banished" ou de "Harmony Corruption" tout en leur offrant une dextérité et un sens redoutable de la mise en scène. L'exécution de ces petites perles de death extrême est un véritable bréviaire d'efficacité, avec des morceaux supers accrocheurs et à clouer sur place n'importe quel blasé. Autour de ce formidable travail d'écriture, Simon Efemey a bâti un véritable mur sonore, à décoller la plèbe. Aussi intriguant que ça puisse paraître, Napalm Death vient peut être de signer là son meilleur album et aussi le plus monumental.

Classement : 6/6 (encore une note maximale ! Décidément...)
Production : 5/6
Livret : 3/6


Christophe Lorentz / Site Internet X.ROCK / 2000

Le retour foudroyant des pères du grindcore, avec un album intense et sans concession, qui marque un nouveau départ dans leur formidable carrière.

Pas loin de 20 ans d'existence pour les Anglais de Napalm Death, et pourtant, ce onzième album sonne comme une véritable cure de jouvence. Après avoir exploré plusieurs autres tendances dures du métal, Mark Greenway, Jesse Pintado, Mitch Harris, Shane Embury et Danny Herrera sont revenus ici au genre qu'ils ont purement et simplement créé : le grindcore ! Mais un grindcore moderne, tout à fait dans la lignée de ce qui se fait de mieux dans le genre actuellement, loin des éjaculations bruitistes de 10 secondes qui composaient l'essentiel des premiers albums du combo d'Ipswich. Morceaux plus construits mais toujours aussi cinglants, rythmique épileptique, production organique et puissante (volontairement proche de ce que peut donner le groupe en live), paroles au fort contenu politico-social... Pas de doutes, Napalm est au mieux de sa forme, toujours aussi intègre, intransigeant et ultra violent. De vrais ennemis du "music business", dévoués corps et âmes à la cause du métal extrême. Un nouveau label, de nouveaux producteurs, un retour salvateur au grindcore, un groupe plus soudé que jamais... Bref, un nouveau départ pour Napalm Death, qui peut sans problèmes continuer comme ça pendant encore 15 ans.


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