THE CODE IS RED... LONG LIVE THE CODE

ANALYSE DE CHAQUE CHANSON

"The Silence Is Defeaning" : ça part très vite et ça démarre sur du Discharge - on est en terrain connu - certains mots hurlés par Barney sont doublés (un peu dans le style question / réponse), ça rend vraiment puissant (comme si Manowar faisait du grind ! - lol). Dés le début de l'album, on sent que Barney maîtrise parfaitement son sujet... et c'est une sensation qui va aller croissant durant le reste du LP. Un peu à la manière de "Next On The List", Napalm colle ensuite une bonne accélération avec un riff aérien qui se complique vite (ce blast fait penser au "Intention Surpassed" de Defecation). La suite est surprenante car on a droit à un ralentissement très original : un plan super glauque avec quelques accords doom bien appuyés suivis de quelques harmoniques légères. Impressionnant. Surtout quand ça s'enchaîne sur un rythme mid-tempo ultra heavy avec un riff dévastateur (je me demande si les lignes de guitare sont en contrepoints mais je peux vous dire qu'il y au  mélange de tonalités étonnantes). Typique de Napalm Death tout en étant sacrément inspiré. Que demande le peuple ? Excellente titre d'ouverture pour ce nouvel album.

"Right You Are" : un des pires blasts que Napalm ait jamais enregistré. Imaginez un peu : 52 secondes au compteur ! On est revenu en 1988, à l'âge d'or du grindcore. Et oui, si vous examinez bien les durées de chaque titre de la carrière des grindeux, vous vous apercevrez qu'ils n'avaient pas écrit de chansons aussi courtes depuis "From Enslavement To Obliteration" et sa chiée de singles ("The Curse", Split single avec S.O.B.). Ca démarre sur un break assez simple de batterie, Barney a juste le temps de gueuler ces 3 mots : "right you are" avant que ça ne blaste de partout, le riff de guitare est plutôt compliqué et fait penser à certains plans de "Utopia...". Quant au refrain, il est minimaliste à souhait. Ce schéma se répète une seconde fois avant que des cris aigus - particulièrement réussis - ne finissent le morceau dans un élan de démence absolue. Instantané, accrocheur et... tout simplement réjouissant ! Vive ce putain de grind !!

"Diplomatic Immunity" : un peu plus complexe mais tout en restant très speed, avec des riffs indus pendant les couplets - joués en blasts puis un riff excellent, dissonant et tordu, pendant le refrain (on s'élève vers de hautes sphères, c'est aérien mais barré - un peu comme si Voïvod avait pris de l'acide et était en plein bad trip ! Ca fait penser à "Repression Out Of Uniform") - ça enchaîne sur une rythmique hachoir avec des riffs cristallins suivi d'un plan swinguant qui rendra le mosh pit dingue. Globalement, c'est morceau extrêmement bien construit même s'il ne dure qu'une minute 50. Mais au contraire, ça le rend plus efficace (et moins chiant) : ND va à l'essentiel et se répète moins, comme ça pouvait être le cas pendant 'la période expérimentale'.

"The Code Is Red" : un titre surprenant pour Napalm car il dispense les éléments traditionnels de leur musique mais sous un schéma progressif auquel nous ne sommes pas familiers. Ca commence par un plan mid tempo avec beaucoup de double pédale et une guitare un peu en retrait qui joue une rythmique peu agressive. Sans crier gare, on passe direct à un blast beat mais la guinde joue un succession d'accords simples et 'aérés', ce qui crée un contraste intéressant avec la batterie. On a droit à un autre couplet + refrain puis du Discharge beat relativement développé (le phrasé de guitare est assez long). Danny est impérial à la batterie (très bon plan 'tribal'), Barney pousse des "huh" à la Tom Angelripper de Sodom, les guitares montent en puissance sur la fin et des vocaux démoniaques parsèment ce décor apocalyptique.  C'est en ce sens qu'on peut affirmer que c'est 'progressif'. C'est la faculté d'augmenter progressivement l'intensité d'une chanson, en démarrant sur quelque chose de plutôt tranquille pour finalement atteindre des sommets insoupçonnables (à la manière de certains groupes rock tels que King Crimson, Rush ou Yes ou, dans le metal, Queensrÿche et Crimson Glory). Globalement, un morceau bien construit qui fait avancer le schmilblick mais qui, selon moi, est un peu trop massif et pas suffisamment dément (il l'est mais il faut attendre 3 minutes - je préfère des trucs plus urgents qui me prennent par surprise !). Néanmoins, il devrait prendre tout son sens sur scène.

"Climate Controllers" : ça débute par un très bon riff oscillant entre l'indus et le power metal, mécanique et tout en retenue, puis ça enchaîne sur un rythme mid tempo saccadé avant un petit bridge à la "Conservative Shitheads Part 2" (qui donne la sensation d'un déluge rythmique). Puis on a droit à un petit Discharge beat sympa mais peu original. Par contre, le refrain qui suit est absolument fantastique : la voix et les guitares se mêlent parfaitement, le tempo est thrash avec une légère accélération de Danny sur la fin,  puis ça redevient mécanique un court instant (pas longtemps) et ça repart sur ce refrain mortel. Ca se calme ensuite un peu avec un bon passage lent à la Celtic Frost appuyés par des vocaux démoniaques ("speak when spoken to !") et ça se termine dans un déluge rythmique à la "C.S. 2". Globalement, un excellent morceau avec un refrain mémorable et une preuve supplémentaire de la suprématie de Napalm Death en ce qui concerne les tempos. Pourvu qu'ils la jouent sur scène !

"Instruments Of Persuasion" : ça y est, Napalm fait du hardcore ! Non, je rigole, cette chanson est encore un pur blast mais l'alternance des vocaux de Barney et Jamey, au tout début du morceau, donne vraiment une touche hardcore de très bonne facture. En fait, l'apport du chanteur de Hatebreed est limité ; il chante conjointement avec Barney dans le style question / réponse : il répète 4 fois "A farce" lors du premier couplet (la dernière intervention est plus appuyée) et 4 fois "Duty" lors du 2eme couplet. Puis un plan lent plutôt 'tranquille' (si on peut utiliser cet adjectif pour ND), ça repart en Discharge beat avec accords faux. La batterie nous offre presque une espèce de cavalcade sur la fin. Un morceau sympa et efficace, plutôt surprenant au début, qui se situe à mi chemin entre le style actuel de ND et le hardcore pur. Donc, d'une certaine manière, il participe aussi à l'expansion du territoire sonore de Napalm.

"The Great And The Good" : le gros morceau du CD et probablement la plus grosse innovation opérée par Napalm. Jello récite ces quelques mots en ouverture : "Napalm Death, TGATG, prise n° 23, distortion maximum" - le rythme du début est un peu étrange, il est dansant et décalé, du Discharge pendant le refrain, d'abord avec Barney, Jello "a pledge is a pledge" et Barney rétorque en vocaux aigus, ça blaste, ça repart sur du Discharge - le refrain x 2. A 2:33, ça prend une autre tournure, un plan crust avec Jello qui récite son texte telle une incantation avec sa voix bizarre (barney en doublé - rendu excellent) avant que ça ne reparte de plus belle ; ND s'affranchit de tous les carcans avec cette chanson ultra efficace et qui vous prend aux tripes. N'importe quel mec qui se prétend fan de Napalm, qu'il soit plutôt métalleux, punk, hardcoreux ou ce qu'il veut, et qui prétend que cette chanson ne lui fait aucun effet est un menteur. J'en suis sûr ! Plus sérieusement, ce titre est une grande avancée pour le groupe de Birmingham et ce serait cool qu'il devienne un classique de leur répertoire.

"Sold Short" : là aussi, un tube - ça commence bourrin avec un excellent riff minimaliste sur fond de blast - terrible !! Même le refrain ne relâche pas la pression et on a la sensation d'être pris dans un tourbillon. Il faut attendre le refrain suivant pour que ça s'aère : un plan dansant, des choeurs de Shane et de Jamey entrelacés aux vocaux de Barney (l'alternance des vocaux est très réussie) - mortel !! Il y a ensuite un pur plan hardcore avec des accords simples de guitare puis les trois vocalistes remettent le couvert. "you've been sold short to a scam" et bam, dans ta gueule, on revient sur le blast du début qui est à la limite du suffocant, tellement il est atonal. Un titre très extrême et qui ne devrait pas être particulièrement exploité sur scène. Réservé aux fans !

"All Hail The Grey Dawn" : on pourrait trouver ce titre faiblard comparé au reste de l'album mais c'est un morceau mid tempo vraiment très bon et bien construit : des riffs indus, une super rythmique (prolongée, bien plus travaillée qu'avant) Danny assure une stabilité parfaite - ND ne peut s'empêcher de speeder à 1:20 - il y a des vocaux de Shane, répondant à ceux de Barney, et ça apporte vraiment un plus au refrain. le blast est bien amené et particulièrement efficace. Vient ensuite un plan lent avec un riff excellent plutôt 'thrash old shool'. On revient à un chorus 'indus' avec des roulements de toms. Un morceau qui rappelle un peu "Next Of Kin To Chaos" et qu'il faut prendre le temps d'apprécier mais qui révèle tout son potentiel au bout de quelques écoutes. Même dans un registre heavy, Napalm Death, "ça déplace tout" (pas comme cette pub minable où la référence en matière de bourrin était Linkin Park... laissez moi rire !)

"Vegetative State" : Ca, c'est un pur blast. Danny joue quasiment à fond pendant tout le morceau, le riff du début est minimaliste et âpre. Le refrain arrive vite avec un riff bizarre, aussi dissonant que "Diplomatic Immunity", mais accompagné de paroles simples et efficaces : "this is a vegetative state" répétés à trois reprises, avec encore une fois Shane aux backing vocals. Ce schéma se répète deux fois avant qu'un plan plus massif ne vienne calmer les choses. On a l'impression d'être sur des montagnes russes. Des vocaux démoniaques et de bons breaks de batterie assurent à ce titre une fin digne des meilleurs morceaux de Napalm. Globalement très bourrin.

"Pay For The Privilege Of Breathing" : ça commence par un riff thrash, la batterie fait quelques roulements avant d'accélérer méchamment. Et là, la guitare joue un riff vraiment excellent, très musical tout en étant extrême, pendant les couplets. Il n'y a pas vraiment de refrain, du moins il n'est pas très évident. Ca blaste à tout vent avant de s'aérer quelques secondes (c'est très court). On enchaîne sur du Discharge beat, Barney assure comme un malade, le schéma se répète une nouvelle fois et le chanteur achève le morceau par des cris aigus hystériques. La aussi, un très bon morceau de 'grind sophistiqué'.

"Pledge Yourself To You" : un morceau un peu plus 'mélodique' de par son refrain accrocheur, avec une touche gore due aux vocaux de Jeff Walker, reconnaissables entre mille. Néanmoins, ils sont mixés plus en retrait que ceux de Jamey et de Jello... à tel point qu'on se demande pourquoi ils sont aussi bas, mais je pense que c'est plus pour créer une ambiance glauque. Un morceau qui parle des choix sexuels, qui devraient être libres de toute entrave sociale / religieuse. Là aussi, il contient tous les éléments propres à Napalm Death et, à défaut d'être le meilleur, est néanmoins très bon.

"Losers" : un très très bon titre, ultra efficace, rentre-dedans tout en étant sacrément musical. Dans un sens, cette chanson est une leçon en terme de composition car elle regroupe tous les ingrédients du style inhérent à ND : des bonnes parties mosh / thrash (Mazette ! Quel riff d'ouverture !), des blast beats à la Repulsion, des notes indus à la Voïvod / Godflesh, des plans 'rouleau compresseur' à la Discharge et des parties lentes à la Celtic Frost, le tout enchaîné avec une aisance insolente. Certains plans me rappellent un peu le feeling de "Thanks For Nothing" sur "Enemy...". En tout cas, c'est le genre de morceau qui vous fait headbanger à en perdre la tête. Cette chanson est disponible sur la version digipack uniquement et on se demande presque pourquoi un titre d'une telle qualité se retrouve relégué au rang de 'bonus'. Heureusement, cette version améliorée semble très facilement disponible sur le marché. Mais elle mériterait vraiment qu'ils la jouent sur scène... (combien de groupes rêveraient d'avoir un titre aussi efficace dans leur répertoire ? Y'en a plein, j'en suis sûr).

"Striding Purposefully Backwards" : sans doute ma chanson préférée. Un véritable tour de force, une démonstration de ce que doit être le grindcore : joué à fond, avec plein de blasts saccadés et des riffs ultra rapides qui nous emmènent dans tous les sens, une sensation de suffocation tellement l'intensité est dingue... puis une cassure inattendue qui donne lieu à un plan progressif : des guitares dissonantes et répétitives accompagnent les vocaux graves / aigus. Le rendu est phénoménal. Napalm ne répète ce plan que deux fois à la fin du morceau et c'est dommage car il est original et totalement dément. La classe !

"Morale" : autre grosse innovation de cet album. Napalm a toujours flirté avec les chansons de ce genre, plutôt lentes, dépressives et angoissantes. On se souvient entre autres de "Multinational Corporations" sur "Scum", "Evolved As One" sur "F.E.T.O.", "Harmony Corruption" sur l'album du même nom, "Contemptuous" sur "Utopia Banished", "Cold Forgiveness" ou "Self Betrayal" sur "Diatribes / Greed Killing", "The Lifeless Alarm" sur "Inside The Torn Apart"... et cette liste n'est pas exhaustive. C'est un aspect de leur musique hérité en grande partie des scènes industrielle et alternative, et plus particulièrement d'un groupe new yorkais appelé The Swans (le batteur, Ted Parsons, jouera plus tard avec Prong puis Godflesh). ND n'avait pas trop tapé dans ce style lors de ses derniers albums et il s'y remet sauf que, cette fois, l'inspiration est là. Le riff de base est génial et Barney nous offre une prestation flamboyante. Comme quoi ce n'est pas qu'un simple hurleur dans un  groupe de noise. Le type arrive à faire passer beaucoup d'émotions dans sa voix lorsqu'il déclame les paroles plus qu'il ne les chante. Des cris de douleur encombrent l'espace sonore, donnant l'impression que la torture ne s'arrêtera jamais. On est chez les Cénobites, Pinhead en tête... Bref, ce morceau est une vraie réussite !

"Our Pain Is Their Power" : c'est une continuité du morceau précédent. Instrumentale, elle est plutôt à tendance 'industrielle' : on entend juste une guitare qui joue des riffs dissonants et répétitifs, avec un peu de basse et quelques samplers et juste quelques murmures... Ce qui fait froid dans le dos, c'est surtout le son de cette guitare, comme des ongles qu'on racle sur un tableau et qui font un bruit strident et désagréable, donnant une impression quasi sadomasochiste. Comme c'est bon, le napalm !

Evidemment, la seule envie que j'ai lorsque j'ai fini d'écoute le CD, c'est de le remettre au début ! En plus, en tant que die hard fan, je me réjouis de voir mon groupe préféré afficher autant de vigueur, de créativité et de talent après tant d'années.

« The Code Is Red... Long Live The Code,
Lighting the way to a panic mode »


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