Voici la traduction du livret intérieur de
"NOISE FOR MUSIC'S SAKE" :

Les commentaires ci-dessous sont l'oeuvre de Dom Lawson, journaliste auprès du magazine anglais Kerrang !


« NAPALM DEATH A RUINE MA VIE »

En cette période de pop metal à usage unique, qui parle pour ne rien dire, et parmi ce déluge de connards obsédés par le style rétro, c’est facile de devenir un vieux con cynique et blasé et d’oublier que la musique peut vraiment changer votre vie. Les fans de metal sont plus sensibles à ce genre de trucs que la plupart des gens : les amis qu’on se fait, la coupe de cheveux qu’on a, les vêtements qu’on porte, les endroits où l’on traîne, les boucles d’oreilles qu’on arbore constamment… D’une certaine manière, tout ceci naît au moment où l’on réalise la puissance émotionnelle et pleine de compassion et l’excitation viscérale que le heavy metal peut fréquemment fournir. Faites en ce que vous voulez mais en ce qui me concerne, je suis entré dans la Communauté Universelle du Metal quand j’ai vu le clip vidéo – à moitié sérieux – de Iron Maiden, "Run To The Hills", lors de l’émission Top Of The Pops. La vidéo en elle-même était une grosse merde mais la chanson a failli faire exploser mon cerveau en cours de développement et j’ai été immédiatement converti aux ‘voies de l’acier’. Depuis lors, ça a un engouement continu et je trouve la musique heavy actuelle bien plus excitante qu’avant. Mais malgré l’influence prépondérante que Maiden a eu sur moi lorsque j’étais ado, ce n’est pas ça qui a eu l’impact le plus lourd et le plus prolongé sur mon cœur et mon esprit. Cet honneur revient à Napalm Death – qui n’était même pas un authentique groupe de metal la première fois que j’en ai écouté – et, seize ans plus tard, c’est avec un honneur immense que je me vois contribuer à cette collection franchement phénoménale des meilleurs titres du groupe et à ce deuxième CD ultra fun rempli d’explosions sonores plus obscures.

Comme beaucoup de monde, la première fois que j’ai entendu Napalm Death, c’était durant l’émission légendaire de John Peel sur la Radio One durant l’année 1987. Etait-ce un morceau de "Scum" ou de la première session, je ne saurai le dire, mais je me souviens être resté pétrifié par le vacarme barbare et dément qui menaçait de détruire les minuscules enceintes de mon poste radio. Quasiment dés le début où j’ai goûté à Napalm Death, au grindcore (comme on allait ensuite l’appeler) et à la musique extrême véritablement innovatrice, ça a été une expérience qui a fondamentalement changé ma vie. C’était – et c’est toujours – la musique la plus proche de mon cœur, une cacophonie sauvage, sans répit, qui vous démolit les oreilles et qui résonne avec une colère, une énergie et une passion véritables. Dés que j’ai pu mettre la main sur une copie de "Scum" – un chef d’œuvre spontané bricolé à partir de deux sessions d’enregistrement entièrement distinctes et comprenant deux line-up différents – j’étais totalement converti. Tout, des vocaux brutaux et presque inhumains aux riffs sauvages et hyper rapides qui faisaient penser à un mélange de Celtic Frost et de Discharge poussé à l’extrême jusqu’au vacarme spasmodique des blast beats invraisemblablement rapides, "Scum" est devenu ma bible sonore. Ca reste encore l’un de mes disques favoris.

Toujours considéré par de nombreuses personnes – à tort, d’après moi – comme le line-up définitif de Napalm Death, le groupe qui enregistra le second album, le monstrueux "From Enslavement To Obliteration", ressemble à une réunion de stars. Aux vocaux, le seigneur anarcho-punk du Doom en personne, Lee Dorrian. A la guitare, le meilleur représentant du shampooing Timotei, Bill Steer. A la batterie, la tornade grindcore forte en gueule, Micky Harris. Et à la basse assortie d’une distorsion inimaginable, la machine métallique avec sa coupe afro, Shane Embury. Même si on fait abstraction des disques géniaux qu’ils ont enregistré ensemble, ces quatre musiciens ont contribué à la scène anglaise dans une très vaste mesure (metal, rock, noise…) grâce à des groupes aussi divers et fructueux que Cathedral, Carcass, Scorn, Meathook Seed, Lock Up, Firebird - entre autres.

Quand cette incarnation de Napalm Death arriva à son point de rupture après une tournée au Japon à la fin des années 80, on eu l’impression que la musique extrême allait connaître un destin tragique. Fort heureusement, cet obstiné de Monsieur Embury réussit à sauver les meubles et fin 89, une nouvelle formation était en place – qui deviendrait finalement l’escadron grind de cinq membres que nous connaissons et aimons tous. Après que l’album "Harmony Corruption" ait fait un deuxième trou du cul au death metal anglais, mettant par là même beaucoup de puristes en colère à cause d’une production trop typée « Morrisound », Napalm Death allait perdre Micky Harris et assembler ce qui est désormais devenu le line-up classique du plus important groupe de metal extrême anglais.

Avec deux nouveaux guitaristes (Jesse Pintado de Terrorizer et Mitch Harris de Righteous Pigs), un nouveau batteur (Danny Herrera, complètement inconnu) et le supporter d’Aston Villa le plus destructeur vocalement parlant, Barney Greenway, qui reprenait le poste de chanteur, le Napalm Death qui aborda les années 90 était plus fort, plus doué musicalement, plus impliqué politiquement et plus en phase avec le metal que jamais. Depuis lors, un flux constant de musique géniale a émané de ce quintet. Vous pouvez entendre des extraits de tous leurs albums sur le premier CD de "Noise For Music’s Sake", du grind redoutable issu de "Utopia Banished" avec des morceaux tels que "Judicial Slime", "The World Keeps Turning" jusqu’à la brutalité monstrueuse et pleine de groove de leur période soi-disant progressive ; l’écrasante bombe à fragmentation qu’est "Hung", le hit dangereusement accrocheur qu’est "Greed Killing", le féroce "Lowpoint", le globuleux et déchiqueté "Next Of Kin To Chaos"… Tout un tas de choses qui prouvent clairement que, malgré ses origines simplistes et bruyantes, Napalm Death a toujours eu beaucoup de cordes à son arc et a toujours fait preuve d’une capacité surprenante à produire régulièrement des chansons monstrueuses tout en étant mémorables.

S’agissant des textes, là aussi, Napalm Death s’est toujours tenu à l’écart des autres. Même à leurs premiers pas, quand les membres fondateurs Justin Broadrick et Nik Bullen dirigeaient le groupe, la pensée politique et l’expression d’une rage consciente et avisée ont toujours été une partie essentielle de la raison d’être de Napalm et c’est quelque chose que Barney Greenway, en particulier, continue de protéger et d’entretenir telle une arme essentielle dans l’arsenal du combo.

A moins d’avoir vécu en ermite durant les seize dernières années, vous aurez du mal à ne pas reconnaître l’importance qu’a eu Napalm Death. Comme Sabbath, Priest et Maiden avant eux, Napalm a influencé une foule d’autres groupes ; de leurs pairs d’un moment tels que Entombed, Fear Factory et Sepultura jusqu’aux extrémistes actuels que sont Nasum, Pig Destroyer et Scalplock (les grindeux agités d’Angleterre dont les déclarations politiques et musicales ont beaucoup de choses en commun avec les idéaux délivrés sur "Scum" il y a tant d’années de ça). La clé de la popularité durable et vaste du groupe tient en deux points. Tout d’abord, Napalm a toujours fait preuve d’intégrité, une intégrité qui n’a rien à voir avec celle, puérile et ‘ooh, pas vrai qu’on a l’air authentiques’, qu’affectionnent les groupes de true black metal et ce genre de posers. Non, Napalm Death pense chacun de ses mots et chacun de ses riffs et cela, tout le monde peut clairement le sentir. Deuxièmement, c’est un groupe qui a atteint un statut légendaire sans que ses origines ne disparaissent à la vitesse de la lumière. Leurs deux derniers albums se classent parmi les meilleurs de leur illustre catalogue et il y a peu de groupes qui continuent d’être aussi prometteurs et d’épater à chacune de leur nouvelle livraison. Toujours fidèles envers leurs croyances, leur musique et ce nom qu’ils ont maintenu en vie pendant presque deux décennies, Napalm Death est un des rares groupes qui comptent en ces temps égocentriques et superficiels. "Noise For Music’s Sake" démontre cela bien mieux que tous mes superlatifs bafouillants, donc je vous conseille vivement de soigner vos oreilles avec ce festin d’extrémisme musical glorieux car il améliore notre qualité de vie. Est-ce que je pourrais tirer la langue plus loin que je ne souffle
(web : ???) Probablement pas, mais Napalm Death a ruiné ma vie. Rendons tous gloire aux dieux du Grind !

Dom Lawson – content à en crever, Mai 2003


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