BLIND TEST
Blind Test de Barney mené par Renaut Doucet, paru dans le Hard'n'Heavy de février 2005
De passage à Paris pour le X-Mass festival,
nous avons convié Barney, le chanteur de Napalm Death, à un petit blind test
dans un salon cossu de la Locomotive. Toujours aussi gentil et serviable, le
grogneur s’est prêté au jeu avec une bonne humeur non feinte, heureux de pouvoir
disserter avec nous sur les fondements et l’origine de son groupe.
TERRORIZER : « Enslaved By Propaganda » / World
Downfall (1989)
Barney : (après
quelques secondes) Terrorizer ! C’est facile (rires) !
HnH : Avais-tu été
contacté, à l’époque, pour chanter sur cet album ?
Barney : Non, et je
n’ai jamais pensé qu’ils me contacteraient…
HnH : Pourquoi ?
Barney : Simplement
car ils étaient au complet et qu’ils n’avaient pas forcément besoin de moi
(rires) ! Mais je pense que s’ils me l’avaient proposé, je l’aurais fait…
J’adore cet album, mais ils n’avaient pas forcément besoin de moi, et je pense
même que ça aurait été un peu trop téléphoné si j’avais participé à cet album.
Et puis la voix d’Oscar (Garcia) collait parfaitement à ce projet.
DEATH : « Torn To Pieces » / Scream Bloody Gore
(1987)
Barney : C’est Death,
mais attend, je ne me souviens plus du titre... « Torn To Pieces » ! Pour moi,
cet album est définitivement un classique du death metal. Je trouve qu’il est
difficile aujourd’hui de trouver des albums qui se rapprochent autant de
l’essence même de ce style musical. Et c’est vraiment triste de voir que, faute
de moyens, un gars comme Chuck (Schuldiner) n’a pas réussi à être soigné… On
parle quand même des Etats-Unis, là, et ils ne sont même pas capables de soigner
leurs citoyens à partir du moment où ceux-ci ne peuvent pas payer… C’est du
délire, vraiment.
MASSACRE : « Defeat Remains » / From Beyond (1991)
Barney : facile, c’est
Massacre. « Cryptic Realms » ?
HnH : Non.
Barney : « From Beyond
» ?
HnH : Non, c’est « Defeat
Remains »...
Barney : Ah oui. Nous
avions repris un titre d’une démo sur Leaders not Followers 2 – sorti il y a
deux mois - , car nous venons tous de l’underground et c’est pour cela que nous
souhaitions rendre hommage à cette période. A mon sens, les démos ont toujours
été meilleures que les albums, car elles avaient toutes ce côté cru, très
primaire que l’on ne retrouvait pas forcément sur l’album. Et puis Kam Lee, et
son timbre si particulier, ont été une grande influence pour moi, notamment dans
le placement de la voix. C’est une période que je regrette aujourd’hui, car tout
était encore possible. Nous étions jeunes, nous vivions quelque chose
d’extraordinaire et comme il n’y avait pas Internet, nous fonctionnions beaucoup
par échanges de cassettes (le fameux tape-trading – ndr). C’est très difficile
de transmettre cette atmosphère passée aujourd’hui…
MOTLEY CRUE : « Smoke The Sky » / Mötley Crüe
(1994)
Barney : Je ne suis
pas sûr, attend un peu… Je n reconnais pas la voix…
HnH : Qu’en
penses-tu ?
Barney : Ca sonne très
80’s (rires). Ce n’est pas vraiment ma tasse de thé, en fait (rires). C’est
qui ?
HnH : Mötley Crüe
Barney : Ah, Mötley...
En fait, cela ne représente pas grand-chose à mes yeux. J’aime bien les premiers
Mötley, que j’ai découverts quand j’étais très jeune, car à cette époque,
c’était ce qui se faisait de plus heavy. Je les ai vus à Donington pour la
tournée Shout At The Devil avec AC/DC je crois, et c’était vraiment excellent.
Je n’ai pas trop suivi après, lorsque le groupe est devenu trop commercial…
HnH : Connais-tu cet
album avec John Corabi ?
Barney : J’ai dû
l’écouter une fois ou deux, mais ça n’est pas trop ma came. Je préfère les trucs
plus obscurs, plus underground (rires) !
BATHORY : « Baptised In Fire And Ice » /
Hammerheart (1989)
Barney : Hum... je ne
vois pas... C’est quoi ?
HnH : Bathory
Barney : Ah oui,
Bathory. J’adore les trois premiers, mais ensuite, je me suis vite intéressé aux
trucs plus brutaux et je n’ai pas vraiment suivi la suite. J’ai entendu les
suivants mais je n’étais pas à fond dedans. Et puis c’est vrai que les groupes
scandinaves avec leurs légendes et leur culture bien à part ne m’ont jamais
vraiment touché. Je m’intéresse à la culture en général mais quand elle est mise
en avant de cette façon, cela ne me parle as vraiment. Sans parler des groupes à
tendance fasciste qui, eux, ne m’intéressent pas du tout (rires) !
BLACKSTAR : « Give Up The Ghost » / Barbed Wire
Soul (1997)
Barney : C’est Jeff (Walker).
C’est Blackstar ?
HnH : Yep !
Barney : Je
reconnaîtrais Jeff parmi n’importe quels autres chanteurs. D’ailleurs, il chante
sur notre prochain album. Pour être honnête, je ne suis pas trop fan de
Blackstar, je trouve ça un peu trop traditionnel, mais j’adore Jeff, ce qu’il a
fait avec Carcass, et surtout le fait qu’il n’a toujours fait que ce qu’il
souhaitait. Je sais qu’il a quelques projets sur le feu en ce moment dont To
Separate The Flesh From The Bones, un très bon groupe de grind. C’est un
musicien très honnête et un bon pote que je connais depuis des années, ce qui ne
gâche rien.
REPULSION : « Slaughter Of The Innocent » /
Horrified (1986)
Barney : (Après une
seconde) Repulsion (rires) ! Encre un classique. C’est « Acid bath » ou « Festering
Boils » ?
HnH : Non, c’est « Slaughter
Of The Innocent »
Barney : Exact. Que
puis-je dire de plus ? Repulsion fut l’une des influences majeures de Napalm
Death, du moins pour Shane (Embury) et moi. Pour moi, Repulsion était au-dessus
de tout ce qui se faisait à l’époque. J’adorais le côté punk que l’on ne
retrouvait pas chez les autres groupes de death plus classiques, et qui a été à
l’origine de la naissance du grind. Repulsion est le premier groupe à avoir
combiné le death et le punk et c’est ce qui m’a toujours beaucoup plu chez eux.
Nous avons joué ensemble au milieu des 90’s, mais je les ai loupés lors de leur
tournée de reformation l’été dernier…
METALLICA : « Hero Of The Day » / Load (1996)
Barney : Hum…
Metallica ?
HnH : Tout à fait.
Barney : Je reconnais
la voix… No comment (rires) ! J’étais là quand Metallica est arrivé, j’écrivais
régulièrement à son fan-club. J’adore les trois premiers albums, le quatrième
aussi, mais j’avoue que j’ai un peu lâché l’affaire par la suite. Je comprends
d’ailleurs que beaucoup de fans aient laissé tomber… Quand tu fais quelque chose
d’aussi bien que ce qu’ils ont fait, il est très difficile de rebondir vers
quelque chose d’autre, et de très différent à fortiori. Les fans ont besoin de
s’identifier au groupe et le tournant qu’ils ont pris après le Black Album fut
tout de même radical… Pour résumer, je vénère les trois premiers albums qui
représentent le début d’une nouvelle ère, mais j’avoue que ce qu’ils ont fait
sur la fin ne m’intéresse absolument pas.
SUFFOCATION : « Surgery Of Impalement » / Souls To
Deny (2004)
Barney : Ca me dit
quelque chose...
HnH : C’est un groupe
qui s’est reformé l’année dernière…
Barney : Suffocation !
Encore une fois, je préfère les démos. Pour beaucoup de gens, Suffocation est
une référence, mais j’avoue que j’ai toujours trouvé qu’il manquait quelque
chose… Je ne saurais pas comment l’expliquer, mais je trouve qu’il manque un
truc. Peut être les plans de batterie qui sont un peu étranges. Nous avons joué
avec eux sur l’une de nos toutes dernières tournées et ce sont des gars vraiment
sympas, mais je n’ai jamais été un grand fan de Suffocation. Ils sont très
respectés et ont composé certains classiques, mais je préfère Repulsion
(rires) !
RAMMSTEIN : « Mein Teil » / Reise Reise (2004)
Barney : J’ai déjà
entendu ce morceau… C’est Rammstein ?
HnH : Oui
Barney : Ce n’est pas
trop ma came non plus, mais j’aime beaucoup le concept visuel qui gravite autour
de ce groupe. Il évolue dans un univers très étrange, très froid et assez
glauque, ce qui est assez étonnant pour un groupe qui est devenu aussi gros.
Mais ils viennent de l’ex-Allemagne de l’Est, ce qui doit avoir un rapport. Je
ne suis pas un grand fan, mais je les respecte beaucoup. Je trouve ça peut être
un peu trop basique et évident d’un point de vue musical, mais cela fait partie
du truc.
MACABRE : « Fritz Haarmann The Butcher » / Gloom
(1989)
Barney : Macabre !
C’est sur Dahmer ?
HnH : Non
Barney : Ah oui, c’est
sur Gloom. Pour moi, Macabre est un de ces groupes qui rendaient le death metal
si spécial à ses débuts. Tous les groupes de cette époque essayaient de jouer le
plus vite possible et d’être les plus brutaux possible, mais Macabre avait ce
petit plus. Sa fascination pour les serial-killer, et puis le fait qu’ils
intégraient des plans jazzy à leur musique rendaient ce groupe très spécial à
mes yeux. J’adorais les vocaux également qui pouvaient monter très haut dans les
aigus ou descendre très bas dans les graves, et je me souviens m’être pris de
bonnes tranches de rigolade dans ma chambre en écoutant Macabre, car ils avaient
un côté second degré qui collait parfaitement à leur musique. Le plus drôle,
c’est que même s’ils délirent sur les serial-killers, ce sont tous des gras
vraiment adorables et tout à fait normaux (rires) !
HELLHAMMER : « Massacra » / Apocalyptic Raids
(1985)
Barney : Hellhammer !
Encore un classique (rires) ! Nous avons d’ailleurs repris « Messiah » sur
Leaders Not Followers 2. Ils étaient tellement uniques à l’époque… Tu pouvais
reconnaître Hellhammer à la première note et T.G. Warriror avait une voix et une
façon de l’utiliser tellement particulière, qu’Hellhammer a toujours été un
groupe à part pour moi. Et puis sa musique a toujours eu un côté punk très cru
qui me plaisait beaucoup. Au même titre que Venom, Hellhammer n’a jamais été un
groupe particulièrement doué techniquement parlant, ce qui ne les a pas empêché
de composer des titres incroyables. Encore un groupe qui nous a beaucoup
influencés, notamment dans les passages lents. Il paraît qu’ils sont sur le
point de sortir un nouvel album d’ailleurs, j’attends ça avec impatience !
MARDUK : « Bloodletting » / World Funeral (2002)
Barney : Je crois que
je sais ce que c’est, mais je ne suis pas sûr…
HnH : Vas-y…
Barney : (après un
moment) Non, je pensais à Bolt Thrower mais ce n’est pas ça.
HnH : Vous jouez avec
eux sur cette tournée…
Barney : Ah, c’est
Marduk. Je ne connais pas vraiment pour être honnête. Je ne suis pas un grand
fan de black metal. On nous a proposé cette tournée avec eux, et comme nous
n’avons jamais participé au X-Mass, on s’est dit que ce serait une bonne idée.
Je sais que c’est un groupe assez controversé au niveau de ses textes, et nous
avons d’ailleurs reçu des mails de fans sur notre site Internet qui ne
comprenaient pas que l’on joue avec eux. Maintenant, je ne sais pas grand-chose
sur Marduk, et je ne vois pas pourquoi nous ne pourrions pas jouer avec eux. Je
ne dis pas que je suis un grand fan, mais le fait que nous soyons anti-fascistes
a peut être tendance à dérouter nos fans qui voient en Marduk un groupe
extrémiste.
TOOL : « Forty Six & 2 » / Aenima (1996)
Barney : Ca me dit
quelque chose également… Je ne saurais pas te dire ce que c’est, mais je
connais.
HnH : C’est Tool.
Barney : Ah oui, Tool.
Je ne connais pas très bien, mais j’aime beaucoup ce que j’ai entendu. J’adore
le concept du groupe, mais j’ai tendance à trouver parfois leurs morceaux un peu
longs. Ce n’est pas un groupe que l’on peut qualifier de progressif, mais il a
parfois tendance à répéter certains plans à l’infini, ce qui peut être un peu
lourd. Mais je reconnais que ses membres sont très bons musiciens et que leur
musique est très originale. Et ce qui est incroyable, c’est qu’ils aient réussi
à devenir aussi connus en jouant une musique qui est loin d’être facile d’accès.