NEW RENAISSANCE

Interview de Shane menée par Louis Bourgade, parue dans le Hard'n'Heavy de juin 1997

Alors que l'on avait craint le pire concernant l'avenir de Napalm Death, les Britanniques, après avoir lavé leur linge sale en famille, reviennent avec l'album "Inside The Torn Apart" qui salue le retour de Barney. Bienvenue à la maison !

Bien des rumeurs alarmistes avaient couru sur le compte des Britanniques : le départ de Barney, chanteur charismatique et figure emblématique du quintette de Birmingham, avait semé la confusion dans l'esprit des fans. Certains avaient même annoncé son remplacement ! Phil Vane, d'Extreme Noise Terror, devait lui succéder afin de participer à l'enregistrement d'un nouvel album. Coup de théâtre ! Les membres de Napalm Death admettaient alors qu'il leur était inconcevable d'imaginer poursuivre leur carrière sans leur leader ! Que d'émotions ! Composé dans des conditions très particulières, "Inside The Torn Apart" est aujourd'hui disponible mais sa sortie est quelque peu entachée par un dénouement sur lequel notre interlocuteur se montre parfois amer.



"Hoaïïïooo ! ! !". Shane Embury, le bassiste que ses admirateurs surnomment amicalement Benny Hill, vient de s'identifier au téléphone. Connu pour son insupportable accent des faubourgs, Shane est la hantise des journalistes, condamnés à décrypter chacune de ses interventions afin de ne pas perdre trop vite le fil de la conversation. Shane le sait bien et abuse volontiers de la situation. Courage !

Ce nouvel album a été conçu dans des conditions aussi extrêmes que peut l'être la musique du groupe. Les musiciens ont-ils su faire abstraction des péripéties qui ont illustré son enregistrement et résoudre au mieux l'affaire Barney ?
Je pense que le groupe aurait pu s'en sortir plus mal que ça... Nous avons été capables de faire la part des choses et de composer exactement le genre de musique que nous souhaitions créer, tout en essayant d'apporter une solution au problème du chanteur. Lorsque Barney a réintégré le groupe, il s'est totalement investi dans son travail. Nous avons démarré l'enregistrement dans une ambiance un peu étrange qui a certainement nui au bon déroulement des opérations. Nous avons manqué de temps, nous nous sommes un peu précipités... Nous n'avions pas l'esprit suffisamment libre pour donner le maximum de nous-mêmes. Nous sommes quand même satisfaits du résultat mais l'album aurait ou être encore meilleur. Il se trouve que Barney nous a rejoint au moment où tous les morceaux étaient achevés. Il n'a donc pas participé à leur élaboration et a juste effectué les enregistrements au niveau du chant au tout dernier moment. C'était vraiment étrange ! Barney est parfois un personnage imprévisible mais ceci est une autre histoire...

Napalm Death se devait donc d'assurer la suite de sa carrière avec ou sans Barney. Le groupe avait certainement des comptes à rendre à ses fans. Es-tu certain qu'il soit parvenu à préserver sa spontanéité musicale et à se comporter au final comme si rien ne s'était passé ?
Bien sûr... Tu sais, les difficultés que nous venons de traverser font partie des événements auxquels pas mal de groupes sont un jour confrontés. Je dois reconnaître que Barney nous a posé pas mal de problèmes ces deux dernières années, au point que de sérieuses tensions internes avaient fini par se développer au sein du groupe. Chacun a avait alors éprouvé le besoin de s'éloigner quelques temps de son voisin. Barney doit aujourd'hui réaliser que nous ne sommes pas toujours à sa disposition, et que certaines situations ne lui sont pas nécessairement acquises. Nous avons été obligé d'achever l'enregistrement de l'album en très peu de temps. Ce qui aurait pu tourner à la catastrophe nous a finalement été très profitable : nous nous sommes rapprochés les uns des autres, nous avons estimé ensemble l'étendue du problème et nous sommes parvenus à élaborer un bon album dans des conditions difficiles. Mais nous n'avons certainement pas envie d'y être confrontés une nouvelle fois à l'avenir. Barney nous a, je pense, rejoints pour ne plus quitter le groupe. J'ai l'impression qu'il a fini par comprendre où se situait son intérêt.

Tu viens d'évoquer le nouvel album. Justement, "Inside The Torn Apart" doit-il être considéré comme une sorte de   "best-of" du groupe en 1997 ou bien l'œuvre imparfaite d'une formation qui était sur le point de se séparer il y a peu de temps encore ?
Je pense sincèrement que cet album représente ce que nous pouvions faire de mieux dans des conditions d'enregistrement aussi inconfortables. Sans doute aurait-il pu être encore plus efficace si nous avions eu plus de facilités. Nos avons donc le sentiment de nous être sortis de ce mauvais pas avec un minimum de casse ! Cet album est moins expérimental que Diatribes, son prédécesseur. C'est la raison pour laquelle "Inside The Torn Apart" donne l'impression d'être un disque plus agressif, plus compact. Nous nous sentons aujourd'hui à notre aise dans un style un peu plus traditionnel qui nous rapproche de nos origines. Nous voulions sortir un disque puissant, très heavy, et je crois que nous y sommes parvenus. "Inside...", si l'on tient compte de nos difficultés, n'est pas le meilleur album de Napalm Death mais c'est sûrement un bon album de Napalm Death.

On peut en effet parler d'un léger retour aux sources. "Fear, Emptiness..." et "Diatribes" étaient des albums qui vous avaient éloignés de vos origines musicales ?
Ca dépend... Je n'ai pas le sentiment d'avoir trahi notre cause à cette époque. La puissance qui caractérise Napalm Death avait été préservée mais elle était dispensée de manière différente, qui convenait mieux aux exigences du marché. Nous avons toujours cherché à étonner notre public et à ne pas lui imposer des albums par trop identiques. "Inside The Torn..." est un disque que nos fans assimileront sans difficultés : il contient les ingrédients inhérent au style du groupe et quelques éléments en même temps qui l'isolent du reste de notre discographie.


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