CORRUPTION BANNIE
Interview de Shane et Barney menée par Robert
Muller, parue dans le Metal Hammer sorti en juillet 1992.
Pourriez-vous croire que les Napalm Death aient été traités de vendus avec leur avant-dernier album, Harmony Corruption ? Le bassiste Shane Embury et le chanteur Barney Greenway ont totalement démenti cet état de fait, et en offrent à Metal Hammer une preuve irréfutable : Utopia Banished !
La polémique fait rage parmi les fans de Napalm Death,
mais l'avis de Shane sur la question ne laisse pas d'équivoque... "Peut être cet album est-il celui qu'Harmony Corruption
aurait dû être" soupire t-il, visiblement fatigué par
les interminables discussions qui fusent pour savoir si oui ou non, le groupe de
grind-hardcore aurait dû se lancer dans le death metal à fond et aller enregistrer à
Tampa en Floride avec Scott Burns. "Nous ne regrettons
rien de ce que nous avons fait", ajoute t-il, "Nous ne regrettons jamais rien". "L'album est très dur
malgré tout, il reste plus extrême que 95% des productions des autres groupes", continue Barney.
Mais même si l'album sus-mentionné surclasse largement en
violence et en puissance de nombreux groupes de death metal, il n'en reste pas moins que
ce n'est plus le Napalm Death que nous avions appris à aimer avec Scum ou From
Enslavement To Obliteration. "C'est surtout une
question de production à la base. Cet album révèle Napalm Death sous un jour
différent. Mais si on refaisait un jour tous les titres d'Harmony Corruption
dans un autre studio avec notre son habituel, ils sonneraient beaucoup plus comme ceux du
nouvel album, et les gens ne se plaindraient même plus",
explique Barney.
Alors laissez moi vous dire que si certains d'entre vous
avaient été un peu déçus par Harmony Corruption, ils peuvent foncer les yeux
fermés sur Utopia Banished, qui est tout à fait satisfaisant là où clochait Harmony...
Dés que le premier morceau, "Discordance", jaillit en cascade des
enceintes, il apparaît évident que Napalm Death est revenu à ce qu'il avait toujours
été.
Le nouveau batteur Danny Herrera semble lui aussi s'être intégré au groupe en un rien
de temps !
"Il nous a fait apprécier ce que nous avions fait
auparavant, et c'est certainement grâce à lui que l'album sonne ainsi. Peut être
qu'avant, nous avions essayé inconsciemment de répondre aux attentes des gens. Cette
fois-ci, on s'est dit merde, on veut redevenir nous-mêmes exclusivement", philosophe Barney.
"Nous avons des idées assez précise sur la manière dont nous voudrions que le
groupe évolue à l'avenir, mais je n'en dirai pas plus car beaucoup de groupes lisent
aussi les magazines ! Nous voulons inclure de nouvelles idées dans notre musique, tout en
conservant intacte l'identité de Napalm Death. Les gens ont souvent tendance à confondre
progression et changement de style. Si du jour au lendemain, tu ralentis le rythme de
moitié et tu te mets à jouer des accords bizarres, là, il s'agit d'un changement de
style et non d'une simple évolution", ajoute Shane. "Dans un tel cas de figure, il vaut mieux faire un projet parallèle
ou changer carrément le nom du groupe !"
"Il me semble simplement que beaucoup trop de gens sont toujours prêts à donner
leur opinion", accuse Barney. "J'ai l'impression qu'ils essaient tous de nous dicter ce que l'on
devrait faire, plutôt que de nous laisser tranquillement faire notre musique. C'est le
mauvais côté du hardcore".
Et Napalm Death connaît bien les mauvais côtés du hardcore
en question, puisqu'ils ont été plus souvent accusés d'être des vendus que les New
Model Army eux-mêmes ! Ces accusations ne manquent pas totalement de fondement, mais qui
n'en mériterait pas, si l'on va par là ! Les Napalm Death conservent un état d'esprit
honnête et sans compromis, et ils prouveront à ceux qui prétendent que le succès
n'arrive pas sans quelques compromis personnels qu'ils ont tort.