GODFLESH


"Pure"

Emmanuel Potts / HARD FORCE MAGAZINE / Mai 1992

Ne vous attendez surtout pas à comprendre quoi que ce soit aux paroles émergeant de ce barrage de bruits malsains, mais néanmoins hypnotiques, qui constituent ce troisième album de Godflesh. Boîte à rythmes oppressante, grognements monocordes et guitares répétitives crachant un jus putride afin que vous compreniez qu'il n'y a pas de place pour des pensées sucrées dans la machine Godflesh. Groupe culte aux U.S.A., un peu moins dans leur Angleterre natale, Godflesh ne recule devant rien, pourvu que le son soit compact et vicieux. Ce nouvel album, qui fait suite à l'acclamé "Streetcleaner" (50000 exemplaires vendus dans les sous-sols du monde entier) nous invite à déguster le jeu de guitare torturé de Robert Hampson (ex-Loop) sur quatre coups de massue ("Spite", "I Wasn't Born To Follow", "Predominance" et "Don't Bring Me Flowers") et ce savant fou (école stoogienne) apporte une valise de tourment de plus à la charpente sonore (comme si on en avait besoin ! Mais oui, mais oui, car plus on est de fous, plus on s'amuse) de Godflesh ! "Pure" est un album spécial car il est impossible d'en extraire un seul single dans l'espoir de séduire le peuple qui ignore tout de l'existence de Godflesh... et peut être est-ce très bien ainsi car si les disques de cette bande de mutants se trouvaient dans les discothèques de tout le monde, Godflesh n'aurait plus aucune raison d'exister et de broyer. Toutefois, ce serait rigolo d'entendre "Predominance" gronder des fenêtres du voisinage tout entier le dimanche après-midi ! Godflesh s'adresse aux sens les plus noirs qui sont en chacun de nous. Mais heureusement que la race humaine est composée de beaucoup de moutons dociles, car cela permettra à Godflesh de rester, avant tout, indépendant !


"Selfless"

Fred Burlet / HARD MAG n° 1 / Décembre 1994

Godflesh ou la version anglaise de l'ultra prise de tête ! Pour vous donner un exemple, quand vous devez faire la chronique du nouveau Godflesh en fin de bouclage d'un numéro un, vous finissez au plafond en train de pousser les hurlements les plus divers... C'est vous dire qu'un tel produit n'est pas à mettre entre toutes les mains, car même quand on connaît déjà les deux premiers albums du groupe, Streetcleaner et Pure, on a toujours un choc... Godflesh donne dans la lenteur extrême, dans le minimalisme le plus complet, on attend d'ailleurs le jour où ils feront un morceau avec une seule note ! Difficile de juger un tel groupe, soit on adore ça parce que ça soulage de quelques problèmes psychologiques complexes, soit on ne supporte pas et c'est sans doute l'avis du plus grand nombre. Le duo Justin Broadrick / G. Christian Green a choisi de rester pauvre et anonyme, et la démarche est en soi respectable. Pourtant, Justin semble avoir encore aggravé la situation depuis l'époque où il jouait avec Head Of David. Ils deviennent de plus en plus durs à suivre, et il n'est possible d'écouter ce nouvel album que par petits bouts, sous peine d'y laisser sa santé ! Au contraire, par tranches de cinq minutes, on y prend presque plaisir si on sait choisir son moment... Comme d'habitude, tout est question de dosage !


"Songs About Love And Hate"

Manuel Rabasse / HARD'N'HEAVY / Septembre 1996

Formation à géométrie variable fondée en 1988 par Justin Broadrick et G. Christian Green, Godflesh est l'incontournable initiateur de ce que l'on appelle le "metal-industriel". Un creuset sonore où se mélangent punk, hardcore, musique répétitive allemande des années 70 (Can, Neu, Faust...) et celle de ses descendants (Loop), l'avant-gardisme abrasif des Swans et la lourdeur métallique des zélateurs de Black Sabbath. En fonction de quoi le duo qui se transforme parfois en trio au gré de l'adjonction toujours provisoire d'un guitariste ou, pour ce "Songs About Love And Hate", d'un batteur 'vivant', est la référence obligée (et justifiée, comme le prouve un titre comme "Sterile Prophet") d'un Ministry ou d'un Treponem Pal. Avertissement liminaire : c'est sans doute l'aspect minimaliste, débarrassé de toute scorie électronique ou percussive qui séduit les musiciens chez Godflesh. Il ne faut donc pas s'attendre à déguster quelque trouvaille sonore ou le gimmick qui tue dans ce Song... La musique de Godflesh est extrêmement dépouillée, foncièrement répétitive, rêche, sèche, rugueuse, ascétique. Broadrick arrangue ou aboie plus qu'il ne chante et le batteur aurait aussi bien pu aller jouer au billard pendant les sessions tant les parties de batterie semblent mécaniques. C'est donc essentiellement l'ivresse de l'hypnose qui attire chez Godflesh, entraînant l'auditeur dans une spirale concentrique, un tourbillon tyrannique, un interminable périple en son propre vide intérieur.

Classement : 4 étoiles sur 5


Henri Dumatray / HARD FORCE / Septembre 1996

Il ne sont pas nombreux, mais quand Godflesh se pointe, c'est toujours grand bruit en perspective ! "Songs About Love And Hate" (11 au total) est un album qui a de la suite dans les idées... et l'idée de base, c'est de vous mettre la hargne. Pour y parvenir, les instruments sont traditionnels (basse, guitare, batterie et voix) ou plus sophistiqués (samples en tous genres, boîte à rythmes...). La technique du harcèlement est également employée : il n'est pas rare de subir les assauts répétés du même riff pendant deux bonnes minutes consécutives. Le chant (si l'on peut le nommer ainsi) n'est pas taillé non plus pour vous assouplir les nerfs, puisque le monsieur... il n'arrête pas de brailler dis donc ! Vraiment pas content... La puissance dégagée est franchement ahurissante et il est bien difficile de ne pas s'abandonner totalement à cet univers chaotique. Cependant, Godflesh risque de défriser pas mal les chercheurs de mélodies, car sa performance s'avère exclusivement physique. Dernière remarque enfin, la pochette parle très bien d'elle-même : elle prouve que douceur et compréhension n'ont aucune prise devant l'absence totale de cœur. A bon entendeur... salut !

Classement : Moyen (= à tester soi-même)


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