Benediction est un combo mythique issu de la première génération du death metal. Le groupe est né début 89 des cendres d'une autre formation du nom de Stillborn et comportait le même line-up que celui du premier LP (avec Barney, Peter, Darren, Paul et Ian). Rapidement, les musiciens se mettent à écrire quelques chansons et sortent une première démo, "The dreams you dread ", ce qui leur vaudra d'être remarqués par Mick Harris en personne. Il faut dire que les deux groupes étaient basés à Birmingham, jouaient dans les mêmes clubs et se cotoyaient souvent. De plus, Barney était un fan ultime de Napalm Death, en fait c'était son groupe préféré et il avait même réussi à les accompagner plusieurs fois en tournée ! Bref, il adorait les effusions de violence sonique de la mort au napalm et cela a sûrement du faciliter ses échanges avec Mick Harris, la "tornade humaine". Ce dernier jouera un grand rôle dans leur signature avec le label allemand Nuclear Blast (sur lequel ils sont toujours).

Les death métalleux décrochent donc un contrat discographique et s'apprêtent à enregistrer leur premier album. Mais au même moment, Lee Dorrian et Bill Steer décident de quitter Napalm, obligeant le reste de l'équipe à recruter deux nouveaux membres dont un vocaliste. Et qui prendre d'autre qu'un fan acharné comme Barney ? Le bougre possède un style vocal très influencé par le death metal, là où Lee était influencé par le hardcore, mais Shane et Mick étaient fans du genre et voulaient évoluer vers des sonorités plus métalliques. Barney rentre dans ND en août 89 sans pour autant abandonner ses fonctions dans Benediction. En effet, à cette époque il était courant que les groupes échangent / partagent des musiciens, par nécessité mais aussi par esprit de solidarité.

Le groupe rentre alors aux Soundcheck Studios pour donner naissance à son premier album, et ce sous la houlette de Mick Harris, apprenti producteur pour l'occasion. Les sessions se sont déroulées en deux temps, d'abord en septembre 89 puis en janvier 90. Pourquoi s'est-il passé autant de temps ? Tout simplement parce que Napalm Death sillonnait l'Europe en tant que participant du Grindcrusher Tour ! "Subconscious terror" sort donc en 1990 et pose les jalons d'une version européenne d'un death metal lourd et mécanique, un peu comme une réponse à Master, Death ou Massacre. D'ailleurs, c'est ce qu'indique le sticker apposé sur cet album : "ENFIN ! La réponse anglaise à Massacre. Du Death Metal en provenance des royaumes souterrains. Le rock est mort ! La pop est morte ! THHRRASSHH !!!". La pochette est phénoménale, le paysage d'une île déserte et verdoyante qui baigne dans la lumière du soleil couchant se transforme en une vision cauchemardesque tirée de nos pires phobies.

Et c'est bien le thème de l'album : la terreur inconsciente, celle qu'on ne maîtrise pas et qui peut surgir à tout moment, particulièrement à l'écoute de ces chansons. Il est regrettable que la production soit un peu faiblarde car cela altère leur efficacité (rétrospectivement, les membres de Benediction ne considèrent pas cet LP comme leur premier véritable album mais plutôt comme un assortiment de démos). Ce défaut mis à part, on se laissera facilement entraîner par ce mix de plans thrash et de parties heavy à grand renfort de double grosse caisse. Les enchaînements de rythme sont mal maîtrisés mais les riffs sont bons et les idées sont là. Et puis comment ne pas être estomaqué par Barney et sa voix d'outre-tombe ? Sans aucun doute une de ses meilleures performances. Sur la pochette, il est inscrit qu'il assure les "vocaux et grognements de la mort" (!) et cette définition est plutôt pertinente car il a un timbre de voix vraiment guttural, à l'image de son influence principale, Kam Lee, le chanteur de Massacre. En plus, il signe tous les textes. Bref, c'est un début prometteur qui place Benediction parmi les chefs de file du death metal européen. Ajoutons juste un mot sur l'intro qui est absolument légendaire : Barney récite un texte alors qu'on entend des cris et des bruits de chaîne derrière lui. Ce texte se termine par la phrase "Subconscious terror" suivie d'un message passé à l'envers (vous avez dit subliminal ?) qui revient sans cesse comme une litanie infernale. Totalement dément !

La popularité de Benediction va rapidement s'accroître, contraignant le groupe à tourner intensivement. Or le sieur Greenway est également fort occupé avec Napalm Death qui doit partir en Floride pour enregistrer "Harmony Corruption", sans parler des tournées qui vont avec. Les plannings des deux formations sont incompatibles et le chanteur doit vite faire un choix. En tant que fan absolu de ND, il est hors de question qu'il quitte ce groupe. Il dit donc au revoir à ses comparses et se consacre pleinement au grindcore. Par conséquent, il n'apparaît que sur le premier album, même si on le retrouve deux ans plus tard sur un morceau du mini LP "Dark is the season" : c'est lui qui chante sur "Forged in fire", la reprise du groupe de heavy metal canadien Anvil (bien qu'il ne soit pas crédité sur la pochette). Je pense que c'était une collaboration ponctuelle, rien de plus. Depuis lors, il n'a plus rien enregistré avec eux.

Les death métalleux lui ont trouvé un remplaçant en la personne de Dave Ingram, un bon vocaliste mais qui possède un timbre de voix trop proche de celui de Barney à mon goût. Ils ont continué leur chemin et ont confirmé les espoirs placés en eux avec la sortie de plusieurs albums marquants, particulièrement "The Grand Leveller" et "Transcend The Rubicon". Puis le batteur, Ian Treacy, quitte le navire pour reprendre des études musicales (on le retrouvera six ans plus tard dans Meathook Seed) et Paul Brookes, un prof de batterie, prend sa place derrière les fûts. Benediction sort un EP avec lui et ce sera le seul témoignage car un autre batteur, cette fois-ci beaucoup plus jeune, prend le relais dés l'album suivant, "The Dreams You Dread". La cadence va ralentir car l'album suivant, "Grind Bastard", ne sort que trois ans plus tard. Durant la tournée qui suit, le vocaliste Dave Ingram, est remplacé par Dave Hunt - il est quand même resté sept ans. Depuis, il a remplacé Karl Willets au poste de chanteur dans un autre groupe anglais, Bolt Thrower (on peut l'entendre sur "Honour - Valour - Pride"). "Organised Chaos", le premier album de Benediction avec son nouveau vocaliste, sort trois ans plus tard et affiche tous les signes de vitalité qu'on peut attendre de la part d'un groupe de death metal. Depuis cet album, plus rien. Le groupe n'est pas séparé pour autant, il donne des concerts à droite à gauche et il devrait sûrement enregistrer un nouvel album un de ces quatre.

Globalement, Benediction est une figure de proue du genre et, bien qu'ils n'aient pas fait preuve d'une créativité débordante au cours de leur carrière, à l'instar de Bolt Thrower, ils sont les garants d'une forme de death metal basique et massif, basé en grande partie sur la rythmique, et sont fiers de revendiquer cet héritage old school. Par conséquent, ils sont soutenus par un noyau dur de fans fidèles. Keep the death metal scene alive !


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