Godflesh est encore une fois un projet parallèle incontournable, une référence fondamentale de la scène qui a influencé d'innombrables formations, et pas seulement dans le métal. On pourrait dire que c'est LE pionnier du métal industriel. L'instigateur de ce groupe est Justin Broadrick, guitariste de Napalm Death de 1985 à fin 1986 et il apparaît sur la démo "Hatred Surge" ainsi que sur la première face de "Scum". Il est donc parti très tôt du groupe. Il faut croire qu'il était plus attiré par les sons industriels bizarres que par le grindcore pur et dur... Et bien s'en faut lorsqu'on examine la carrière de Godflesh, ce combo ayant remarquablement repoussé les limites du style. On pourrait même dire qu'il a créé un courant musical à lui tout seul...

C'est fin 1986, au cours d'un concert commun avec leurs pairs de Head Of David, que Justin quitte Napalm. Il restera une paire d'années et enregistrera quelques albums, non pas en tant que guitariste mais en tant que batteur (il faut se souvenir qu'avant de jouer dans ND, il il avait un projet nommé Final dans lequel il jouait de TOUS les instruments !). Au même moment, il jouera aussi dans Fall Of Because puis formera Godflesh.

Après un premier album sorti sur le label d'un disquaire de Birmingham, Earache approche le groupe et lui offre un contrat pour plusieurs albums. "Streetcleaner", le véritable premier LP distribué mondialement, lance un pavé dans la marre. On découvre un mélange de metal/hardcore et de sons stridents, héritage du courant industriel pur et dur (Throbbing Gristle, Neubauten). Justin décrivait sa musique comme "une version ralentie à l'extrême de Discharge". Les voix sont agressives à certains moments, aériennes à d'autres. Les tempos sont parfois répétitifs, et une boîte à rythme vient ajouter une touche d'originalité. Cet album se vend bien et permet à Godflesh de partir en tournée.

Ceci est le point de départ d'une carrière bien fournie : durant les années 90, Godflesh sortira six albums longue durée (hors compiles, remixes et singles / EPs). Globalement, on peut dire que le groupe est resté très intègre et, bien qu'il ait fait évoluer sa formule, il a gardé une certaine continuité - ce qui est respectable comme démarche. D'ailleurs, ce combo est très respecté au sein des scènes métal / industrielles / alternatives. Par la suite, le groupe a occasionnellement employé les services d'un batteur : il y a eu Brain Mantia (plus tard dans Primus) ainsi que Ted Parsons (des défunts Prong et The Swans). Cela donnait à la musique un côté plus chaud, plus organique.

Godflesh arrive à combiner avec une facilité déconcertante des plans grind ou punks et des riffs / vocaux cristallins. Il n'est pas forcément limité au créneau heavy, s'essayant parfois à la formule acoustique (comme le fabuleux titre "Empyreal 2" sur la compile "Rareache") ou flirtant allègrement avec la scène techno via des albums /EPs de remix. D'ailleurs, Justin s'est beaucoup investi dans ce domaine, allant jusqu'à monter son propre projet, Techno Animal, avec lequel il a sorti pas mal de disques. Il avait aussi remixé divers titres (notamment "Walk" de Pantera sur leur mini du même nom sorti en 1992 ainsi qu'un titre de Godflesh sur la compilation "Hellspawn").

Le contrat avec Earache est arrivé à son terme en 2000. Après une compilation rétrospective alliant le meilleur du groupe à une brochette d'inédits, Godflesh s'en va sur Music For Nations où il sort l'album "Hymns". Réussite artistique indéniable. Par contre, la situation dans le groupe préoccupe le bassiste, GC Green (le compère de Justin depuis les touts débuts) et il décide de s'en aller quelques mois plus tard, en octobre 2001. Justin a poursuivi six mois avec un autre zicos (Paul Raven de Prong) mais il a vite réalisé que sans son acolyte, l'alchimie était perdue à jamais. Il a mis fin à l'aventure Godflesh en avril 2002. Un an plus tard, le label américain Relapse édite un EP avorté intitulé "Messiah".

Le témoignage qu'aura laissé Godflesh est inoubliable. En plus d'être foncièrement originale, sa musique était hypnotique, lourde et angoissante. En tout cas, elle vous prenait aux tripes ! Alors si vous ne connaissez pas encore, essayez de voir ce que ça donne. Vous n'aimerez peut être pas mais force est de reconnaître que ce combo aura été particulièrement innovateur et influent.


Retour